samedi 17 décembre 2011

Un bon trimestre

   J'en tremblais par avance. Certes je ne suis pas mécontente que les vacances scolaires aient enfin mis un terme provisoire aux quatre kilomètres quotidiens de conduite à l'école sous une pluie diluvienne avec force bourrasques, ce dont je me passerai bien volontiers la semaine prochaine, à part pour une prochaine virée au supermarché en vue du repas de Noël...
   Mais je savais bien que vendredi soir, en allant rechercher mon fils dans sa classe de moyenne section, je récupèrerais, en plus du « cahier de vie » (mais où vont-ils chercher ces expressions ?), le carnet d'évaluation. Sous son air tout à fait quelconque le carnet d'évaluation, soigneusement choisi pendant l'été en suivant à la lettre les pointilleuses instructions de la liste de fournitures, peut vous gâcher vos vacances de Noël.
   Car les vacances de Noël marquent la fin du trimestre. Et qui dit trimestre dit évaluation, et qui dit évaluation dit carnet d'évaluation. Oui, même en moyenne section. Et comme votre enfant n'a pas plus de quatre ans, difficile de lui reprocher des résultats insuffisants. Alors c'est vous, parents, éducateurs, qui vous sentez jugés. Vous aurez beau vous dire que votre rejeton est encore loin de passer son bac, une appréciation défavorable pourrait contrarier les rêves de réussite que vous formez pour lui.
   Bref, hier soir, une fois rentrée de l'école, tremblant de froid et d'anxiété, m'assurant que Fiston n'était pas dans les parages pour assister à mon éventuel désarroi, j'ai ouvert le redoutable carnet d'évaluation.
   Première remarque : je me réjouis de ne pas être daltonienne. En effet, l'acquisition des multiples compétences demandées aux élèves de moyenne section, qui forment une longue liste de treize pages et demi en police 10 (par exemple, « jouer à Lapin a du chagrin », « devenir élève », « utiliser la bande numérique »...) est sanctionnée par un petit rond de couleur verte, orange ou rouge selon le degré de réussite de votre enfant.
   Heureusement pour moi, la dominante verte m'a assez vite rassurée. Mais les points colorés ne sont pas tout, et c'est avec frénésie que j'ai balayé les treize pages et demi jusqu'à la fin, cherchant avec appréhension l'appréciation écrite par la maîtresse. A côté de la case « signature des parents », par laquelle Monsieur et moi manifesterons notre lecture attentive et déférente du carnet, une grande case remplie d'une belle écriture appliquée, une écriture d'institutrice, nous renseigne :
« XXX a fait un bon trimestre »
   Ouf ! Le soulagement est sensible. J'ose à peine imaginer ce que feront les pauvres parents qui ont lu en même temps que moi que leur enfant « a fait un mauvais trimestre ». En fait, ça m'est égal, tout ce qui compte c'est que nous attendrons la grande section de maternelle pour nous ruiner en cours particuliers chez Acadomia.
   J'ai poursuivi ma lecture. Hélas, le tableau n'est pas aussi rose (ou vert, rapport aux points de couleur) que ce que j'imaginais.
« XXX devrait cependant « grandir » davantage... »
   Il me semblait que cela allait de soi, que les enfants grandissent tous seuls, généralement. « Oh, comme ils ont grandi ! » : vous savez, c'est ce que vous entendez toute leur enfance, après l'avoir entendu tout au long de la vôtre.
« ... et prendre plus d'assurance »
   Ça y est, je le savais ! La maîtresse m'a observée, à la réunion parents-enseignants du début d'année, en pleine discussion passionnée avec les autres mamans. C'est un message codé, je pense : « Votre enfant manque d'assurance, mais regardez-vous, Madame, pas étonnant ! »
« Nous attendons de lui qu'il nous fasse partager ses connaissances plus spontanément. »
   Alors là, pardonnez-moi, mais je sais qui est coupable. Quand on se souvient de la première poésie enseignée à nos têtes blondes dès le début du mois de septembre, on se demande par quel miracle nos enfants pourraient encore avoir envie de partager leurs connaissances personnelles, puisqu'ils n'en ont aucune (enfin, presque aucune, soyons juste).
  J'ai félicité Fiston pour son bon trimestre, parce qu'il le mérite, tout de même. Partager ses connaissances, prendre de l'assurance, grandir... il aura tout le temps plus tard, au deuxième trimestre. En attendant, qu'il profite de ses vacances !
  Et de son enfance...

4 commentaires:

  1. Même principe que l'entretien annuel en fait : trouver un axe de progression et accessoirement une raison d'être à l'encadrement hiérarchique...

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  2. Oui et en plus l'entretien annuel vous culpabilise en vous rappelant que vous ne serez jamais totalement efficace à votre place, parce que vous aurez toujours à apprendre...

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  3. Si les cours s'imposent, j'ai des réducs pour toi ;)

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  4. Ils ont décidé de vous éliminer, et leur sentence est irrévocable.

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