dimanche 15 janvier 2012

Goûter d'anniversaire (2/2)

  Je les renvoie tous dans la chambre, ce qui me laisse quelques instants pour gratter les miettes de chocolat sur le parquet et ramasser les pièces du puzzle. « Qui a ouvert la porte de la chambre interdite ? Gustave, tu sors ! ». Le brouhaha ne cesse de croître – encore trois quarts d'heure avant la fin, comme le temps passe lentement ! – j'interviens pour suggérer des occupations plus calmes. « Et si vous mettiez toutes les petites voitures à la queue leu leu pour faire un embouteillage ? ». C'est un succès total, le calme revient pour dix minutes, trente-sept véhicules se retrouvent alignés les uns derrière les autres. Je reviens en courant au son des « pim pom pim pom » tonitruants : il fallait s'y attendre, l'embouteillage s'est vite transformé en carambolage.

  C'est le moment de dégainer ma toute dernière arme, mon ultime atout. « Jeu de société » ! Tous les enfants prennent place autour de la table, et lancent les dés les uns après les autres. J'ai parfois l'impression d'être seule à jouer : « Bravo Romain, tu prends cette carte, tu la poses ici, tu rejoues, tu relances le dé, tu as perdu, à toi de jouer Basile, tu lances les dés, tu tires une carte... » Au moins, le calme règne ! Et Gustave, qui finit grand perdant, n'est même pas mauvais joueur.

  Il reste vingt-cinq minutes. En rangeant le jeu, je demande aux garnements de ne pas se mettre debout sur les fauteuils, et « non, Gustave, tu ne touches pas à la télécommande ». C'est le moment rêvé pour prendre en photo la brochette de garçons alignés sur le canapé. Deux minutes de gagnées. A ce moment-là, vraiment, chaque seconde compte !

  « On peut regarder la télé ? » « Non, Gustave, tu n'es pas là pour ça ». Je me demande pourquoi Gustave est là, d'ailleurs, surtout que je remarque en passant devant le porte-manteau qu'il a tout bonnement subtilisé le cadeau de Romain et l'a même glissé dans la poche de son vêtement. Je m'empresse de le rendre à son propriétaire, j'entends une porte qui claque au fond : c'est Gustave qui est parti bouder dans la chambre.

  On est en avance sur mon planning. La pêche à la ligne aurait dû durer plus longtemps, et si la bougie magique s'était rallumée j'aurais encore gagné deux minutes. Je suis à cours d'idée, et je me dépêche d'improviser une occupation pour la toute fin de l'après midi.« Et si on imitait les cris des animaux ? » A nouveau règne un calme relatif au milieu des grognements, pépiements, meuglements et aboiements. J'ai les yeux rivés sur ma montre, c'est fou ce que ces aiguilles se traînent. Et soudain... « Ding dong ! » La sonnerie stridente me paraît ce jour-là le son le plus mélodieux du monde. En cinq minutes, trois mamans arrivent et enlèvent leurs enfants respectifs. Je n'ai pas entendu les remerciements de Gustave ni de sa maman, mais peu importe. Il reste encore un invité, celui que mon fils préfère, dont les parents ne semblent pas pressés du tout. Une demi-heure plus tard, passée à lire des histoires sur le canapé, sa maman arrive enfin, en s'excusant pour... ses cinq minutes de retard. Je ne saurai jamais si je me suis trompée en rédigeant l'invitation ou si c'est elle qui l'a mal lue.

  La maison est redevenue paisible. Les emballages de carambars encombrent encore le plancher, la cuisine est envahie de vaisselle salle, du jeu d'échecs en cristal et de divers jouets confisqués tout au long de l'après midi, j'ai un peu mal au dos. Pourtant la journée n'est pas finie : je dois encore m'évertuer à monter un playmobil offert à mon fils. En déchiffrant la notice, je songe que ce goûter d'anniversaire est une vraie réussite. Tout au long de l'après midi j'ai lu dans les yeux brillants du héros du jour combien il était ravi, entouré de ses amis et de ses frères, ravi de s'amuser avec eux et de souffler ses bougies en leur compagnie. « Je voudrais bien refaire un anniversaire demain ! » déclare-t-il, plein de reconnaissance, tandis que j'entame le rangement de la cuisine. « Ah, mais tu sais, maintenant il faut attendre l'année prochaine. »

  Et j'ai comme le pressentiment que Gustave ne sera pas de la partie...

4 commentaires:

  1. C'est là qu'on voit l'intérêt d'un jardin (allez tous jouer dehors -pendant que je mange les Smarties)

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  2. Par expérience, les parents arrivent plutôt en avance et reviennent pas trop pressés : ton timing explose en général... Prévoir un plan B, B bis, voire C.

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  3. <a href="http://6 février 2012 à 20:34

    Le jeu en vaut-il la chandelle, je l'ignore, mais je suis ravie de t'avoir amusée quelques instants.

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