mercredi 25 juillet 2012

Au tout début

  Dans une maternité, il y a un hall où l'on prend un ticket pour attendre son tour. Pas de file d'attente prioritaire pour les femmes enceintes – cela va de soi. Une fois affiché votre numéro, vous vous asseyez devant le guichet : dans une maternité il y a des chaises partout. Le personnel administratif vous demande de décliner votre identité et de fournir votre carte vitale, en échange de quoi vous aurez droit à une grande feuille mystérieuse couverte d'une trentaine d'étiquettes autocollantes mentionnant, sous un code barre, votre nom et votre date de naissance, et dont vous vous demanderez longtemps à quoi elles peuvent bien servir.

  Dans une maternité, on attend beaucoup, on attend la sage-femme qui est en retard, on attend l'infirmière qui doit vous faire votre prise de sang, on attend à l'accueil administratif, on attend aux urgences, on attend dans des couloirs, dans des salles d'attente. De toute façon vous en avez pour neuf mois à attendre, alors... rien ne presse.

  Dans une maternité, il fait chaud. En hiver il fait chaud, en été il fait encore plus chaud, et vous avez le temps de vous en rendre compte pendant les longues minutes que vous passez sur votre chaise dans la salle d'attente.

  Dans une maternité, vous n'existez que sous votre nom de jeune fille. C'est lui qui est marqué sur les trente étiquettes, c'est par lui que les sages-femmes et le personnel administratif vous appelle. Et pourtant, étrangement, tout le monde vous appelle « Madame » : « Madame Nomdejeunefille, c'est à vous. »

  Dans une maternité, on vous parle un langage étrange, fait de lettres et de chiffres. 35 SA, HU 31, DPA 6/04, BIP 80, RCF 154 : quelques mesures obscures, c'est tout ce que vous pourrez savoir sur le petit inconnu qui se prépare.

  Dans une maternité, vous entendez de drôles de bruits. Ici des cris de nourrissons étranges et vigoureux, ailleurs un bruit sourd et rythmé d'environ cent-cinquante pulsations par minute. Vous le reconnaîtriez entre mille, c'est le bruit du cœur d'un bébé qui n'est pas encore né, amplifié, qui résonne dans tout le couloir.

  Dans une maternité, vous croisez de drôles de personnages - outre les sage-femmes en blouses roses et sabots blancs, et les futures mamans à la démarche légère, accompagnées parfois d'hommes aux bras ballants - de minuscules petits êtres couchés dans des berceaux transparents. Vous avez beau avoir déjà des enfants, vous aurez du mal à ne pas les prendre pour des prématurés. Ce n'est que le jour de la naissance que vous comprendrez qu'ils avaient une taille normale : impossible de ne pas oublier à quel point un nourrisson est étonnamment petit.

  Une maternité, c'est un monde un peu à part, souvent à l'extérieur de la ville, un lieu un peu étrange. Et pourtant bien souvent c'est là que tout commence.

6 commentaires:

  1. Le matricule, l'attente sans fin, l'ignorance de quelle va donc être la prochaine étape, les noms de code totalement hermétiques... tout cela n'est pas sans me rappeler ma mobilisation au Vietnam. Tu es sûre que tu es vraiment une maternité ?!

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  2. Et que dire, mais que dire, de la porte, la fameuse porte, celle que l'on franchit lorsque la sage-femme qui vous a accueilli vous annonce avec un grand sourire : "bon ben Madame Nomdejeunefille", on va passer en salle d'accouchement." Cette porte, on la franchit seul et à pied dans un sens...et dans l'autre sens, sur un lit à roulette, un bébé dans les bras. J'ai hâte d'être à janvier pour la franchir une troisième fois !

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  3. Et pourtant, malgré ce que tu décris, tu observeras qu'un bon nombre des "plus beaux jours de ma vie" de nos contemporains se situent... dans une maternité.

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  4. Et que dire du post accouchement dans cette même maternité ? lieu des premiers pleures de bébé, de ses premiers soupirs et des premieres siestes contre sa maman ? Et bien parfois, cette maternité ressemble plus à une école rigide et froide. Je m'explique : Si vous êtes ici pour la toute première fois, vous n'êtes donc qu'une ex jeune fille sans connaissance et dénué de bon sens, puisque "jeune maman" Savez vous qu'il est interdit de dire que "peut être" votre enfant ne supporte pas le lait ?? (preuve sera faite 15 jours plus tard qu'il est allergique) mais d'ici là contentez vous des yeux au ciel des puericultrices qui pensent que vous faite un monde de bien peu de choses !! Alors maternité publique ou privée, ne comptez que sur le bonheur de la maternité au sens devenir mère, car pour le reste, même avec des murs peints en rose, vous êtes toujours la chambre n° XX et la Madame Nom de jeune fille, en césarienne ou en voix basse ...

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  5. <a href="http://27 juillet 2012 à 01:56

    Merci Ruppert !

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