dimanche 21 septembre 2014

Cessez le feu (des nouvelles de Xavier – encore !)


Vous vous souvenez qu'il y a quelques jours le fils de Xavier avait été surpris en train de jouer avec un briquet, ce qui, vous le reconnaissez, ne pouvait manquer d'inquiéter un peu connaissant le passif de la famille en terme d'incendie, même si Xavier s'est empressé de lui confisquer l'objet, et même si ce dernier ne cesse de gagner les lots les plus farfelus aux tombolas des environs, ce qui, soit dit en passant, n'offre aucune protection contre un départ de feu.

Bref, vous attendiez tous que je vous annonce que la maison de Xavier, avec son toit flambant neuf (sans jeu de mot) avait disparu dans de nouvelles flammes allumées par son propre fils.

Vous allez être surpris, mais je vais devoir vous détromper. La maison de Xavier est toujours debout, et, plus étonnant, son fils a changé d'occupation. D'après mes enfants, il s'amuse désormais à asperger d'eau toute la cour de récréation.


Voilà qui est plutôt rassurant.

jeudi 18 septembre 2014

En ciel

Les pelleteuses creusent, les automobiles ronflent, les marteaux-piqueurs pilonnent, les moteurs fument, les métros se remplissent, les immeubles se vident, les klaxons retentissent, les freins crissent, les téléphones sonnent, la ville bruisse, la rue bourdonne et les piétons filent les yeux baissés sous la pluie.

Mais là-haut dans l'azur, irisé, éphémère et lumineux, l'arc, comme tendu entre deux mondes, étire ses couleurs éternelles.



dimanche 14 septembre 2014

Le jour où j'ai replongé

Il y a quelques semaines, j'ai failli sombrer dans l'addiction.

Cela a commencé peu après la naissance de mon cinquième enfant. Après neuf mois passés à porter plus ou moins les mêmes vêtements de moins en moins flatteurs au fur et à mesure que les semaines passaient, j'ai ressenti un irrépressible besoin de renouveler ma garde-robe.

Il se trouve que justement les soldes ont commencé à ce moment-là. J'ai passé d'abord une commande sur internet (parce qu'avec un nouveau-né à la maison, rien ne vaut les courses en ligne) et j'ai attendu de recevoir mon colis. J'ai fait mes essayages, puis je suis allée à la Poste renvoyer ce qui ne me convenait pas. J'ai passé une nouvelle commande, puis une autre. J'ai découvert des boutiques en ligne que je ne connaissais pas. Je me suis trompée plusieurs fois dans la taille, j'ai échangé, j'ai renvoyé les articles, j'ai changé d'avis. Et puis je me suis avisée qu'il manquait encore des pièces à ma garde-robe. Et des pièces à assortir avec ces nouvelles pièces. Et des chaussures. Et des accessoires. Et puis ce fut la deuxième démarque. Mon salon était devenu une zone de stockage de cartons en transit, ma chambre un showroom et la Poste l'annexe de mon appartement. Je passais mon temps à remplir des bons de commande et des bons de retour, je ne rêvais plus que chiffons, vêtements, chapeaux, tenues.

Et puis un jour, après quatre chemisiers, deux jupes, une veste, trois robes (que je n'ai toujours pas portées) et un headband, j'ai pris conscience de l'engrenage dans lequel je me jetais. Il était urgent de passer mon temps à autre chose qu'à remplir mes armoires et vider mon compte en banque.
Il faisait beau, c'était juillet, et j'ai décidé de tourner la page. J'ai tout fait pour me désintoxiquer. J'ai bloqué mes boutiques en ligne préférées, oublié mes mots de passe, verrouillé les ventes privées et désactivé les publicités. J'ai trouvé des dérivatifs (repriser des chaussettes, manger du chocolat, acheter des robes - pour ma fille, faire des pique-nique et des bulles de savon). Au bout d'une semaine je pouvais allumer mon ordinateur sans avoir la tentation de consulter une boutique en ligne. Au bout de deux semaines je pouvais passer devant un magasin sans trembler. La sensation de manque s'atténuait, et la troisième démarque est passée sans que je fasse un seul achat.

C'est ainsi que j'arrivais début septembre, fière de ma persévérance et de ma force d'âme.

Et puis un jour j'ai rendu visite à ma sœur. « Tiens, tu veux me donner ton avis, je me suis acheté une robe, mais je ne suis pas sure qu'elle m'aille ».

La robe lui allait très bien, mais ma sœur n'était pas convaincue par le style. « Tu veux l'essayer ? » m'a-t-elle proposé.

J'ai accepté, parfaitement sereine. La coupe ne m'irait pas, j'étais tranquille : aucun risque d'être tentée. J'ai enfilé la robe.

Ce fut une catastrophe.

Au premier regard dans le miroir j'ai senti que nous étions faites l'une pour l'autre.

Elle me va très bien. Elle est même très jolie. La couleur me plait. La coupe est ravissante. Je me sens si bien dedans. Jamais je n'aurais pu m'en séparer. J'ai tenté de résister. J'ai fait mine d'hésiter. Mais je savais très bien que tout cela était vain. C'était une telle évidence.

Je suis repartie avec la robe.

Et le pire, c'est que je n'ai presque pas de remords.
 

 
De toute façon, c'est la faute de ma sœur.


jeudi 11 septembre 2014

Le retour de Béatrice

Mais que devient donc Béatrice ? se demandent peut-être certains d'entre vous. Figurez-vous qu'il y a encore quelques jours, je me posais la même question que vous. Mais que peut-elle donc devenir ?

Souvenez-vous... Béatrice, conservateur à la Bibliothèque Nationale, spécialisée dans les amphores dionysiennes, dont le mari, Philippe, n'a « aucune culture générale », Béatrice qui a la faiblesse de me prendre pour une personne cultivée (du moins plus cultivée que son époux).

Hélas, depuis que nous les avons reçus au printemps 2013, point de nouvelles de Béatrice. Oh, je ne me suis pas inquiétée excessivement : j'ai l'avantage de passer régulièrement devant sa maison et c'est souvent que j'aperçois sa silhouette derrière la fenêtre de la cuisine ou du salon. En janvier, certes, elle avait répondu par mail à mes vœux de bonne année en me demandant si nous étions prêts à venir dîner chez eux. « Mais plutôt deux fois qu'une, Béatrice !», avais-je écrit avec enthousiasme. Depuis, pourtant, aucune nouvelle, pas même de réponse au faire-part de naissance envoyé en mai dernier.

J'avais déjà renoncé à croire qu'un jour nous reprendrions contact, et je le regrettais vivement, quand le hasard, providentiel et opportun, nous poussa, Béatrice et moi, à sortir nos enfants le même jour dans le même parc à la même heure.

« Oh mais c'est toi Albane ! Comme je suis heureuse de te revoir ! »

Le ton était sincère. Béatrice avait l'air vraiment contente de tomber sur moi.

« Nous pensons beaucoup à vous, tu sais, Philippe et moi. Très souvent. »

Béatrice compte sans-doute sur la télépathie pour me donner de ses nouvelles, malheureusement je ne suis pas équipée pour capter ses pensées, ni celles de son mari.

« Et voilà ton petit bébé ! Je suis impardonnable, je n'ai même pas répondu à ton faire-part. Je voulais faire les choses bien, dans les formes... résultat : je n'ai rien fait. »

Nous avons passé un bon moment à discuter sur un banc au soleil. Béatrice m'a donné les dernières nouvelles de sa famille, de son travail au milieu des amphores, le tout entrecoupé de nombreuses protestations d'amitié. « Il faut vraiment qu'on vous reçoive à dîner ! Je vais en parler très vite à Philippe. »

Enfin nous nous sommes quittées, l'heure du dîner approchant. « A très bientôt ! » m'a lancé Béatrice en filant sur sa trottinette derrière ses enfants.

C'était il y a quinze jours.

Depuis, aucun signe de vie de Béatrice.
 
Difficile de conserver à la fois le patrimoine antique et les amitiés contemporaines...


Sauf peut-être à ce que je me change en statue ?
 
 
 

lundi 8 septembre 2014

Il ne faut pas jouer avec le feu (des nouvelles de Xavier)

Impossible de reprendre du service sur ce blog sans vous donner des nouvelles de Xavier, bien-sûr !

Xavier, dont l'histoire familiale a été marquée par un dramatique incendie et qui, vous vous en souvenez, a vu deux logements successivement dévorés par les flammes en quelques semaines.

Mais vous n'avez pas oublié que le mauvais sort semblait avoir définitivement cessé de tourmenter le pauvre Xavier, et que la bonne fortune recouvrée s'est manifestée en mai dernier par le gain de quatre places de cirque à la tombola du club de hockey de son fils.

Ce que vous ignorez, par contre, c'est que quelques semaines plus tard, la chance souriait à nouveau à l'heureux Xavier et à toute sa famille, le désignant parmi tous les parents d'élèves comme le gagnant de l'un des plus fameux prix de la loterie de la fête de l'école : une magnifique centrale vapeur.

Bien-sûr, les mauvaises langues prétendront que le fait que Xavier tienne le rôle de secrétaire général de l'association des parents d'élèves n'est pas étranger à ce succès inespéré. Pour ma part, et vous ne me contredirez pas, je préfère y voir la preuve que la vie se montre à nouveau clémente avec Xavier qui pourra désormais, sans crainte ni arrière-pensée, repasser ses chemises sous son toit neuf.

Je formulerai un seul vœu, toutefois, à l'intention de Xavier. Si la chance, les dieux et les éléments le couvrent de leur ombre protectrice et bienfaisante, qu'il n'oublie pas pour autant dans son bonheur de bien surveiller ses héritiers.

Car la semaine dernière, mes fils m'ont confié avoir vu l'aîné de Xavier, âgé de six ans, jouer avec un briquet.
 

mercredi 3 septembre 2014

Roméo et Juliette

Ils se sont tant aimés que le monde entier résonne encore de leurs serments enflammés ; ils ont tant soupiré et gémi que le monde entier bruit encore de leurs détresse infinie ; ils ont tant souffert que le monde entier pleure encore leur destinée brisée.

Mais dans le monde entier rien sinon la mort ne pouvait réunir ces deux êtres que tout – le monde, les hommes et les lois – séparait.
 




Et pourtant, des centaines d'années plus tard, l'histoire semble revivre.

Elle n'a pas grand chose à voir avec les Capulet, il ignore tout des Montaigu ; la cour d'école où ils joueront à la marelle évoque peu les marbres de Vérone, et le tube de colle qui les a réunis sur la première page de leur cahier de vie n'a pas le génie inspiré d'un Shakespeare.

Mais dans la classe de moyenne section de mon fils, ils se sont enfin retrouvés.
 

Il faudra quand-même se séparer à l'heure des mamans, Roméo et Juliette...
 


 


lundi 1 septembre 2014

Une rentrée bien préparée

Il y a plusieurs façon de préparer la rentrée. La plus classique, celle que recommandent tous les magasines féminins, la plupart des blogs de mamans et une grande majorité de mères de famille, tient en deux mots : organisation et anticipation.

- Les fournitures, je les ai achetées en juillet, m'a expliqué vendredi Bénédicte, une mère de famille dont la fille est dans la classe de mon fils.
- Pareil, tout est prêt pour nous, a répondu Bénédicte, une autre mère de famille portant le même prénom et qui a également un enfant dans la classe du mien.
- Il ne me reste que l'inscription à la piscine.
- Pour le conservatoire, je l'ai inscrit en juin.
 
Et puis il y a la deuxième méthode, celle de Rose-Marie.

Rose-Marie, elle aussi, a un enfant dans la classe du mien. Depuis le banc du jardin public où je me tenais en compagnie des deux Bénédicte qui se félicitaient d'avoir si bien préparé la rentrée imminente, nous avons vu Rose-Marie, tout juste revenue de vacances, arrivant en souriant d'un pas léger, le regard rêveur et distrait, portant sur la hanche un bébé aussi dodu que sa mère est fine et élancée (il doit tenir de son père).

- Au fait les filles, a demandé Rose-Marie avec un sourire désarmant de candeur après que nous ayons échangé des banalités sur le temps et les vacances, au fait... vous allez penser que je ne suis pas bien renseignée, mais, dites-moi... c'est quel jour exactement la rentrée ?



Bien préparée ou non, je vous souhaite une très bonne rentrée !
(Et si vous trouvez quelque part des stylos bille pointe fine avec emplacement caoutchouté pour les doigts, faites-moi signe, il me reste 24 heures pour compléter mes courses de fournitures!)