dimanche 8 avril 2012

Mon boulanger est très empathique

  Assez jeune, une petite boucle à l'oreille, un physique plutôt rond accentué par le tablier rouge noué juste sous la taille, mon boulanger a l'habitude de me voir entrer dans sa boutique sur le chemin de l'école, accompagnée, selon les jours, d'un, deux ou trois enfants et d'une poussette.

  Chaque fois qu'il m'arrive d'acheter du pain, je hisse la poussette sur les marches, je franchis la porte à ouverture automatique, je jette un coup d'oeil à l'étalage pendant que le boulanger s'approche derrière le comptoir, « Bonjour, je voudrais un pain de campagne tranché s'il-vous-plait », je rejoins la caisse, sort mon porte-feuille, attrape le sachet de pain, range ma monnaie, dis « au revoir ».

  Et chaque fois, depuis plusieurs mois, le boulanger me répond « au revoir » et, tandis que je me dirige vers la sortie, me lance en souriant d'un air compréhensif :

« Bon courage ! »

  Je suppose qu'il considère que le nombre d'enfants dont je suis affublée en exige beaucoup. J'ose espérer qu'il ne me trouve pas l'air particulièrement épuisé et négligé – je vous assure que même avec trois enfants je trouve le temps de dormir la nuit et de me coiffer le matin. Mais comme je suis d'un naturel plutôt bienveillant et optimiste, je n'ai jamais tellement pris ombrage de cette interjection pourtant insolite de la part d'un commerçant.

  Néanmoins, la dernière fois, celui-ci a franchi une nouvelle limite.

  Comme d'habitude, je suis rentrée, tenant un enfant dans une main, la poussette vide dans l'autre, j'ai franchi les marches, jeté un coup d'oeil à l'étalage. J'ai vu le boulanger saisir un pain, le trancher dans sa machine, le glisser dans un sachet, avant de se diriger vers sa caisse. Un peu interloquée, car j'étais la seule cliente présente, j'ai fini par comprendre qu'il n'avait même pas attendu de me demander ce que je souhaitais avant de me servir.

  Sous le coup de la surprise, j'ai vérifié « Un pain de campagne, c'est ça ? », il a répondu par l'affirmative, j'ai sorti mon portefeuille, attrapé le sachet, rangé ma monnaie, et je suis sortie en disant au revoir.

  « Bon courage ! » a-t-il lancé en souriant comme d'habitude.

  J'ai peut-être l'esprit de contradiction, mais je crois bien que la prochaine fois je prendrai une baguette.

7 commentaires:

  1. J'ai trois enfants aussi et, bizarrement, personne ne m'a jamais souhaité "bon courage". Sans doute n'est-ce réservé qu'à nos méritantes mamans ?

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  2. Il m'a tout l'air d'un serial killer.

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  3. Tu as encore de la chance qu'il tolère ta présence dans sa boulangerie dis-moi !

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  4. Pour toi le boulanger, pour moi la boulangère. C'était à Chambéry, avec une poussette, deux enfants à la main, et un gros ventre bien rond. La boulangère parle et conclut : "quatre enfants, mais après ça vous arrêtez, n'est-ce pas ?" Et ce jour-là, en verve, ou agacée de cette intrusion dans ma vie privée, j'ai répliqué : "La prochaine fois, Madame, mon mari et moi prendrons rendez-vous avec vous, et nous en discuterons tous les trois".

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  5. La prochaine fois, tu dis "c'est moi qui vous souhaite bon courage" (gniac gniac).

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  6. Ne te plains pas, ma boulangère et perverse : elle gave les enfants de bonbons et du coup, ils veulent s'arrêter chez elle chaque fois qu'on passe devant sa boutique (certains diront qu'elle est bonne commerçante, moi je la trouve vicieuse).

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  7. <a href="http://18 juillet 2012 à 18:55

    Oui, c'est un peu agaçant, je suis bien d'accord.

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