samedi 6 août 2011

Beaucoup de bruit pour rien

  En quittant il y a un an notre ancienne résidence datant des années soixante pour un nouvel appartement au sein d'un immeuble récent, nous avons changé d'environnement sonore. Nous avons quitté un appartement mal isolé, laissant parvenir jusqu'à nous le vacarme des cavalcades des petits-enfants de la voisine du septième – nous étions pourtant au quatrième, les disputes tonitruantes de la voisine du dessous et de sa fille, les échos de la télévision de la grand-mère d'à côté, les basses de la musique du voisin du troisième, et autres atmosphères sonores diverses, jusqu'au bruit de pas des voisins du dessus se levant la nuit pour se rendre... vous savez où.
  Dans cet immeuble, chaque nouvel arrivant était observé d'un œil suspicieux par toutes les personnes âgées de la cage d'escalier – c'est à dire la grande majorité des occupants, craignant à juste titre de voir se détériorer leurs conditions de vie avec l'installation de voisins bruyants. Sans nous en rendre compte, étant donné surtout que nous étions jeunes, et susceptibles par conséquent d'organiser trois fois par semaines de bruyantes soirées avec un minimum de quinze invités, nous avons été étudiés avec crainte et circonspection par une dizaine de vieilles dames aux aguets derrière leurs rideaux et s'échangeant leurs observations entre l'ascenseur et le local poubelle.
   Mais nous avons passé avec succès, et même brillamment, cet examen d'entrée dans la cage d'escalier. Avec les félicitations du jury ! Nous nous en sommes rendu compte lorsque nous rencontrions les voisines retraitées qui, l'une après l'autre, nous félicitaient avec un soulagement marqué et un tremblement d'émotion dans la voix : « On ne vous entend pas ! » s'exclamaient-elles toutes d'une seule voix. « Vous pouvez rester autant que vous voulez» continuaient-elles. Même, ensuite, avec deux enfants en bas âge, nous étions toujours complimentés pour notre bonne conduite acoustique, alors que les petits-enfants de la voisine du septième gâchaient la vie des habitants sur au moins trois étages, ce qui nourrissait l'essentiel des conversations de l'immeuble depuis plusieurs mois. Une lettre collective a même été rédigée par le professeur de biologie du cinquième, sur l'impulsion de la voisine du sixième, excédée, cardiaque, et ne parvenant plus à dormir. Il faut dire que nous, nous n'avons jamais autorisé nos enfants à jouer sur le palier avec une balle de ping-pong après 22 heures...
  Et quand nous avons annoncé notre départ, l'année dernière, aux voisins avec qui nous avions lié connaissance, la réaction a été unanime : «Mais qui allons-nous avoir à votre place ? ». Ils n'avaient pas tort, puisque j'ai appris par la suite qu'une jeune femme s'est installée dans notre ancien appartement, et que le tapage que faisait son fils a contraint nos anciens voisins du dessous, arrivés depuis un an, à quitter les lieux.
  Depuis notre déménagement dans une résidence quasi neuve, parfaitement isolée, nous n'entendons plus jamais rien. Je me surprends même parfois à me demander si nous ne sommes pas les seuls habitants de l'immeuble, étant donné le silence qui règne. A peine entend-on parfois un lave-linge tourner, et encore, je suppose qu'il est alors en mode essorage à la vitesse maximale. Jamais un bruit de pas, jamais un bruit de porte, et très, très rarement, un peu de musique le samedi soir, lors d'une soirée dont les organisateurs préviennent parfois, d'ailleurs, les voisins, en affichant un petit mot courtois dans l'entrée. Un havre de paix. Un îlot de silence. Un calme parfait.
  Pourtant, ce samedi matin, la sonnette a retenti. Notre nouveau voisin du dessous, 26 ans environ, s'est présenté. Il m'a expliqué que nos enfants sont bruyants. Que sa femme est infirmière, qu'elle travaille de nuit, qu'elle a besoin de dormir. Et qu'à partir de huit heures du matin, les bruits des pas et des jeux des enfants l'empêchent de se reposer.
   Bien-sûr, je n'ai pas eu la présence d'esprit de le rembarrer en lui disant que rien n'interdit à des enfants de jouer sagement à partir de huit heures du matin même si quelques discrets échos de leurs jeux arrivent à traverser le plancher – leur propre père, lui, n'a aucun mal à dormir tard le dimanche matin alors que le reste de la maisonnée est bien réveillé.
  Visiblement notre infirmière de voisine, qui n'a d'ailleurs pas pris la peine de se déplacer elle-même, est une maniaque qui ne peut pas dormir autrement que dans un silence total, et qui, par malheur, travaille de nuit et dort le jour. Il y a peut-être comme une légère erreur dans le choix d'un logement en immeuble collectif. Et c'est bien ce que j'ai l'intention de leur dire si nos voisins viennent se plaindre à nouveau.

6 commentaires:

  1. Gaspacho andalous5 août 2011 à 18:20

    Super article ! La maison de retraite est ici indiquée.

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  2. salut on a eu le même problème avec un voisin qui travaillais la nuit Mais lorsqu'il recevait c'était le folklore alors on s'est pas gêné et ce sont eux qui se sont calmer Il faut essayer de vivre en bonne intelligence et de mettre de l'eau dans son vin des deux côtés mais il est évident que des enfants cela dort la nuit et pas le jour bonne soirée

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  3. Pour habiter dans un immeuble ancien et bruyant, et parfois travailler de nuit (et donc dormir le jour), je recommande... LES BOULES QUIES ! Hyper efficaces, tu devrais les conseiller à ta voisine ;-)

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  4. Ou lui en offrir la prochaine fois quelle se plaint :D

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  5. Tu as bien raison Albane, te laisse pas faire !

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  6. <a href="http://29 août 2011 à 19:21

    Eh bien en fait j'ai appris qu'ils déménagent... ils seront restés trois mois. C'est bien la première fois que nous faisons fuir le voisinage.

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