dimanche 18 novembre 2012

Non violence

   Quand on parle de violence, on a tendance à penser uniquement à la violence physique. Mais il existe d'autres formes de violence : la violence routière, hélas, fléau des temps modernes, mais aussi la violence verbale.

   Cette dernière forme de violence peut paraître secondaire, mais elle mérite néanmoins qu'on lutte vigoureusement contre ses manifestations qui peuvent engendrer tant de souffrances.

  Par exemple, l'autre jour, en allant rechercher mes enfants à l'école, devant le panneau d'affichage qui jouxte la porte de la classe, entre une affiche pédagogique prônant la non-violence et la liste des menus de la semaine à la cantine, j'ai été témoin d'une conversation entre la maîtresse de moyenne section et la maman de Léonie au sujet du comportement de Brutus, un autre élève de la classe.

 - Bonjour Madame, je voulais vous parler de Brutus qui n'arrête pas de renverser Léonie pour la faire tomber par terre.

   A mi-voix, mon fils me confirme qu'en effet Brutus, le « nouveau » de la classe, ne passe pas une récréation sans bousculer volontairement ses camarades. J'entends l'enseignante qui répond :

 - Ah bon, Brutus a poussé votre fille ? Je n'ai rien vu...

 - Si si, ma fille s'est fait renverser trois fois depuis le début de la semaine. Regardez sa bosse !

   Court silence.

 - Brutus est un enfant gentil, mais il s'énerve vite en récréation..., explique la maîtresse.

   Voilà comment pratiquer la non-violence verbale. Déclarer « En effet, Brutus est intenable, il n'arrête pas de brutaliser ses camarades », c'est dur, c'est définitif, c'est excessif. Dire « Brutus est gentil, mais il s'énerve », c'est plus délicat, plus respectueux aussi.

 - D'ailleurs il n'y a pas que ma fille qui se fasse bousculer par Brutus, j'en ai parlé avec d'autres mamans, elles m'ont toutes dit la même chose.

   Court silence.

 - Oui... c'est vrai... il taquine parfois ses camarades.

   « Il taquine parfois ses camarades ». La non-violence verbale, c'est toujours voir les choses de façon positive, optimiste ; vous connaissez l'histoire du verre complètement vide, on préfère dire « le verre n'est pas complètement plein », c'est plus juste.

 - Mais vous savez, Madame, rajoute l'enseignante, un léger tremblement dans la voix, j'ai une classe très tonique cette année... d'où mon état de fatigue.

   La maîtresse est experte en non-violence verbale. Elle aurait pu dire « Vous savez, Madame, j'ai des élèves insupportables cette année, je n'en peux plus », au lieu de cela elle parle de « tonicité », c'est plus raffiné, plus positif, moins catégorique, cela fait penser à un nourrisson dont on dit « Oh, regardez comme il est tonique, il tient bien sa tête ».

   Hélas la maman de Léonie a pour sa part de gros progrès à faire en la matière, car elle a continué obstinément la conversation sur un mode hyper-violent en demandant à l'enseignante de veiller à ce que sa fille ne se fasse plus jeter par terre.

 - Mais Madame, vous savez, ce n'est pas facile pour Brutus, il est nouveau dans la classe, il arrive dans un groupe déjà constitué, les élèves se connaissent tous depuis trois ans, alors vous comprenez... c'est sa façon de communiquer.

 J'ai laissé mon fils dans sa classe, avec Léonie, Brutus et les autres, et j'ai longuement repensé à cet échange. Ce qu'il y a de formidable, avec la pratique de la non-violence verbale, c'est qu'elle fait disparaître instantanément toute forme de violence physique. Brutus ne jette pas ses camarades par terre, il dialogue : où est le problème ? IMG 2812

Bah... quoi ?

4 commentaires:

  1. Ce qui est certain, c'est qu'il faut réagir illico, sinon, la brutalité s'installe dans la durée avec la sensation d'impunité qui l'accompagne. Quand ton enfant est sciemment bousculé, la violence qui surgit en toi n'a rien de... diplomatique, ce qui n'empêche pas d'essayer d'établir un dialogue. Mais vite.

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  2. Une chance pour la maîtresse d'avoir des éléments aussi moteurs et forces de propositions dans sa classe !

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  3. Il y a surtout que les maîtresses ont peur des parents des enfants violents alors que les parents polis qui viennent exprimer leur point de vue ne sont pas un danger pour elles.

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  4. On règle tellement de choses avec un bon dialogue...

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